PRODUCTION DE BIOGAZ AU SÉNÉGAL EXEMPLE DE NAMEREL PAR NDEYE FATOU FAYE INGÉNIEUR GÉNIE RURAL ENSA THIÈS

Je m'appelle Ndèye Fatou Faye. Je suis ingénieure agronome spécialisée en Génie Rural. J'ai fait mes études à l'École Nationale Supérieure d'Agriculture de Thiès et j'ai commencé à m'intéresser au biogaz depuis 3 ans. En effet, depuis 2009, je m'intéresse au biogaz et j'ai été, dès mes premières lectures, captivée par cette source d'énergie renouvelable. Je fus très vite convaincue que le biogaz pourrait être la solution aux nombreux problèmes d'énergie que rencontrent les populations rurales. C'est à partir de cet instant, que j'ai opté pour le Génie rural, qui contrairement à ce que beaucoup pensent, ne se limite pas seulement à l'agriculture et aux aménagements hydro-agricoles.

« Dès qu'il s'agit de réfléchir à des mécanismes de développement capables d'améliorer ou de participer à l'amélioration des vies des populations rurales, il est possible et même nécessaire d'interpeler les ingénieurs en Génie rural afin qu'ils participent aux réflexions allant dans ce sens », me rappelait souvent un de mes professeurs. Les questions d'énergie dans le monde rural sont incontournables et actuellement de nombreux ONG, organisations privées et l'État à travers son Programme National Biogaz au Sénégal se sont attelés à trouver des solutions pour faciliter l'accès à l'énergie. C'est ainsi que, avec l'appui et tous les encouragements de mes professeurs, j'ai décidé de travailler dans le cadre de mon mémoire sur une étude de faisabilité technique de la production de biogaz dans un village du nord du Sénégal. Le thème de mon mémoire était le suivant : « étude de la faisabilité technique de la production de biogaz dans le village de Namarel, dimensionnement et évaluation des couts des bio-digesteurs».

Ce qui m'a le plus fascinée dans le biogaz, c'est son rôle dans la lutte contre les changements climatiques. Il permet non seulement de disposer d'une énergie propre mais aussi de réduire la surexploitation des forêts, la désertification, la hausse des températures, et l'émission directe du méthane contenu dans les divers déchets dans l'atmosphère. A travers la production de biogaz, il devient possible de valoriser une large gamme de déchets, ce qui la rend d'autant plus intéressante comme alternative aux énergies fossiles.

Au terme de l'étude que j'ai mené, il a été prouvé que ce village avait tous les potentiels pour la production de biogaz aussi bien à l'échelle domestique qu'à l'échelle industrielle. Il possède un cheptel de prés de 10400 bovins et donc la quantité nécessaire de déjections animales pour une production de biogaz pouvant satisfaire l'autonomisation énergétique du forage en place, l'éclairage public, et les besoins en énergie pour la cuisine et l'éclairage de tous les ménages en place. Mes visites sur le terrain m'ont permis véritablement de me rendre compte à quel point l'énergie pouvait constituer un facteur limitant de la croissance économique. Ces populations souffrent des pannes répétées de leur forage, plus particulièrement les femmes qui se voient obligées de parcourir des distances de plus en plus longues à la recherche d'eau. Ainsi, leur temps consacré à d'autres types d'activité en est réduit, et les filles ont de moins en moins de chance de fréquenter de manière régulière l'école ou de poursuivre leurs études. Elles sont tenues de rester à la maison surveiller leurs frères pendant que leurs mères se chargent d'aller chercher de l'eau ou du bois pour la cuisine ou bien elles même se prêtent à ces diverses activités. Aussi, l'activité socio-économique principale ou même unique des villageois qui est l'élevage ne peut pas être valorisée à cause de l'absence d'énergie. Il est impossible de commercialiser le lait transformé ou non ou la viande à grande échelle et par conséquent la population de Namarel ne bénéficie pas réellement de ses richesses.

L'autre avantage de la production de biogaz est que l'effluent constitue un engrais organique de qualité qui peut permettre jusqu'à certains cas de doubler les rendements dans les périmètres où il est utilisé. Alors, dans le village de Namarel il serait possible très facilement de commercialiser l'effluent dans la communauté rurale de Ndioum qui se trouve à près de 60 km et qui constitue une zone où l'agriculture est assez développée. La production de biogaz constitue ainsi une plus-value de l'élevage.

Le seul inconvénient de la production de biogaz dans cette zone que nous avons signalé dans l'étude est le cout élevé des investissements. Néanmoins, les nombreux avantages économiques font que les investissements pour la production de biogaz sont intéressants et peuvent être rentables à moyen ou à long terme. Et puis quoique l'on puisse dire tous les investissements en énergies renouvelables sont assez élevés car les équipements et les matériaux sont la plupart du temps importés. Par conséquent, sachant que notre planète souffre de l'épuisement progressif des énergies fossiles, nous avons tous un intérêt particulier, quel que soit notre domaine de travail, à prêter un peu plus d'attention à cette problématique. Pour le moment nous en sommes au stade où nous devons un peu plus nous intéresser à la rentabilité économique de la production de ces énergies, et nous battre pour leur rentabilité financière. La disparition du pétrole dans le monde, et la promotion des énergies renouvelables constituent en quelque sorte de nouvelles opportunités pour l'Afrique. Notre continent se doit de relever le défi et de profiter de cette occasion qui s'offre à lui pour enfin faire ses preuves! Nous avons le soleil de notre coté, la force des vents et des eaux, les déchets de notre élevage et de notre agriculture, les plantes utilisables pour les biocarburants, alors nous devons juste réfléchir sur comment franchir les obstacles de notre autonomisation énergétique. Certes il reste beaucoup de choses à parfaire en matière d'énergie renouvelable, mais l'Afrique ne doit pas se permettre de rester passif dans ce débat ! Il serait véritablement dommage pour nous africains d'avoir tous les atouts pour produire notre propre énergie et de nous permettre de continuer à dépendre des autres. Compte tenu de tout ce que nous possédons, ce serait à notre continent d'ici quelques années de posséder le monopole du marché des énergies renouvelables, tout comme le monde arabe par rapport au pétrole actuellement. Et pour cela il serait très important de privilégier les recherches dans ce domaine mais aussi de promouvoir la formation des jeunes, de renforcer les systèmes d'information afin d'être indépendant des importations que ce soient pour les logistiques ou pour le savoir faire.