Abattoirs du Sénégal : Les abats d’animaux transformés en énergie et en biofertilisant
A la Sogas, les bouses de vaches, les abats d'animaux et autres excréments estimés entre 200 et 250 tonnes par jour ont désormais leur utilité. Grâce à la société Thecogas, ces matières organiques sont transformées en énergie et en bio-fertilisant.
La Société de gestion des abattoirs du Sénégal (Sogas, ex-Seras) grouille de monde et baigne dans une atmosphère empuantie par la forte odeur des abats et autres excréments d'animaux. Dans un coin, un hangar cache une grosse machine reliée via des gazoducs en Pvc à un grand digesteur de 4000 m3. Nous sommes au pôle de production électrique de la société Thecogas Sénégal. Ici est né un ambitieux projet de production d'énergie et de bio-fertilisant par la transformation des bouses de vaches et des abats d'animaux. Il est le fruit d'une convention entre cette structure et la Sogas.
1500 carcasses de bovins et de petits ruminants par jour
Grâce à cette technologie innovante, la Sogas gère mieux les 200 ou 250 tonnes de déchets produits dans cet abattoir et dont la revalorisation lui permet de s'assurer une fourniture en énergie propre à un prix plus compétitif. « Ces substrats sont collectés dans un bassin de 450 m3, puis mélangés, avant d'être transférés dans le digesteur où 1.500 m3 de biogaz sont produits par jour. Cette substance est par la suite transportée via des gazoducs en Pvc à la centrale de production électrique de 100 kw de puissance. Voilà donc comment on peut transformer une contrainte, c'est-à-dire les déchets solides, en facteur de développement », explique le Dr Lamine Ndiaye, directeur de Thecogas Sénégal.
Cette première unité pilote de valorisation des déchets permet aujourd'hui d'assurer 60% de l'énergie de la Sogas et 100% de ses besoins pour ses chambres froides. L'abattoir de Dakar produit en moyenne 150 carcasses de bovins et 1200 carcasses de petits ruminants (ovins et caprins). Cette activité de production de viande dégage beaucoup de déchets comme les contenus de panse, le sang des animaux abattus, l'eau de nettoyage des carcasses et de l'abattoir, les déjections des animaux qui séjournent sur le parc de diète avant d'être abattus, les résidus interscolaires, les ongles phanères et cornes, la peau. Si les trois dernières catégories posent moins de contraintes, car étant systématiquement enlevées par des professionnels du secteur, les autres demeurent une contrainte. En effet, jusque-là, les déchets liquides étaient tout simplement jetés à la mer occasionnant une pollution marine importante et les déchets solides déposés sur le site même de l'abattoir provoquant ainsi des émanations de méthane, un gaz à effet de serre 24 fois plus nocif que le CO2. De temps à autre, les tas de contenus de panse étaient brûlés causant beaucoup de nuisance au voisinage immédiat, surtout aux professionnels du parc des petits ruminants.
Selon le Dr Lamine Ndiaye, directeur de Thecogas Sénégal, cette technologie peut être reproduite partout où il y a une masse conséquente de déchets biodégradables. Rien qu'à Dakar, par exemple, on collecte, chaque jour, 1500 tonnes de déchets dont les 60% sont transformables en biogaz et en énergie, explique-t-il.
La mise à l'échelle est déjà en bonne voie, puisqu'un programme a été déjà mis en place. Il a permis d'identifier des villes où cette technologie pourrait être installée. Touba, Tivaouane et Ziguinchor en font partie. Mais le Dr Ndiaye assure qu'il y a des moyens de monter ce type de projet dans toutes les villes du Sénégal.
Elhadji Ibrahima THIAM/Le soleil